PARCOURS SUP' : BILAN D'ÉTAPE

LE GOUVERNEMENT ENTRE DÉNI ET VIOLENCE
Le ministère utilise des éléments de langage pour justifier la nette dégradation du processus d’affectation des bacheliers dans le supérieur :
APB première phase : 80 % des bacheliers affectés fin mai 2017
Parcours sup’ première phase : 50 % des bacheliers affectés fin mai 2018
Cherchez l’erreur !

Selon les chiffres du rectorat, sur les quelques 12 300 élèves inscrits cette année, environ 6 150 ont reçu une réponse positive le 22 mai, et 300 ont d’ores et déjà reçu une réponse négative à tous leurs vœux.

Le gouvernement avait invoqué le tirage au sort de 2017 (qui n’avait concerné que 3 000 bacheliers environ sur plus de 850 000 inscriptions) pour discréditer la plate-forme APB et la remplacer par Parcours Sup’.

Mais le nouveau système est moins performant que le précédent, car bien plus complexe : les élèves de terminale ne pouvant pas hiérarchiser leurs vœux, ils recevront des propositions dans le désordre, mais en conserveront certaines qui ne correspondent pas forcément à leurs objectifs en attendant d’obtenir la place vraiment souhaitée, ralentissant ainsi considérablement le processus.

En fin de procédure, le tirage au sort sera évité parce que le recteur aura la possibilité d’affecter d’autorité les bacheliers sans proposition dans les filières où des places seront restées libres.

Le cœur de cette réforme est bien là : « optimiser » les structures de l’enseignement supérieur en les remplissant à bloc, et surtout éviter de créer des places en université malgré les quelques 40 000 candidatures supplémentaires attendues chaque année entre 2016 et 2021 (l’équivalent de 10 universités environ).

Les conséquences de cette politique : le tri social. Ce sont les candidats dont le dossier est le moins bon qui auront le plus de difficultés à trouver une place. Affectés d’autorité dans une filière non demandée, leurs chances de réussite s’en trouveront amoindries d’autant. La France est l’un des pays où résultats scolaires et origine sociale sont les plus corrélés : ce sont les élèves des milieux les plus modestes qui font les frais d’une école incapable de faire progresser les plus démunis, et désormais d’un système universitaire qui se permet de les éjecter sans même leur donner une chance.

Un certain nombre d’étudiants et de lycéens ont compris les enjeux qui se cachent derrière cette réforme ; le mouvement a touché un grand nombre d’universités où des blocages ont été organisés. La plupart des universités ont été débloquées brutalement par des interventions de CRS, ce qui constitue une première en France où, de façon coutumière, la police n’avait pas l’habitude de pénétrer sur les campus. La liste est longue : 6 mars, Bordeaux ; 7 mars, Nantes ; 23 mars, Lille ; 9 avril, Nanterre ; 11 avril, Strasbourg ; 12 avril, Paris-Sorbonne nouvelle ; 20 avril,Paris-Tolbiac et Sciences Po Lille ; 23 avril, Montpellier (Paul-Valéry) et Grenoble ; 25 avril, Metz et Nancy ; 9 mai , Toulouse… La mise en garde à vue d’environ 70 élèves du lycée Arago de Paris dans des conditions très décriées n’est qu’un épisode parmi d’autres de la brutalité dont ce gouvernement sait faire preuve pour imposer sa politique. La méthode peut s’avérer efficace un certain temps, mais les dégâts à moyen et long termes seront incommensurables.