Dans un entretien à Midi libre en septembre le Ministre a annoncé vouloir « s’attaquer » au collège qu’il a qualifié d’« homme malade du système »*.
Après la réforme de 2016, très contestée par le terrain et en partie détricotée par son prédécesseur, Pap Ndiaye souhaite donc « réformer » le collège en mettant par exemple l’accent sur la transition entre le CM2 et la 6e ou la « découverte des métiers » en 5e.
Sur le papier, rien que ne puissent partager les enseignants des collèges attachés à la réussite de leurs élèves avec une meilleure prise en compte de l’hétérogénéité croissante des classes et des inégalités socio-économiques.
Dans la réalité, la situation des collèges de notre académie ces dernières années nous impose la vigilance...
Concernant la transition entre le CM2 et la 6e, quid des projets « d’écoles du socle » mis en place dans certains collèges ruraux, en Haute-Saône notamment ? Ces projets, soutenus par d’autres syndicats, n’ont pas pour seul objectif une meilleure transition entre primaire et collège mais permettent aussi à l’administration d’économiser des moyens en encourageant par exemple les échanges de services entre primaire et collège. Est-ce cela que veut généraliser le ministre lorsqu’il parlait ailleurs de « 6e passerelles » ?
La découverte des métiers en 5e avancée par le ministre amène aussi quelques questions. Quels moyens seront alloués aux établissements pour mener à bien ce volet de l’orientation ? La fonction de professeur principal qui s’alourdit d’année en année sera-t-elle revalorisée ? Rappelons simplement que de plus en plus de collèges peinent à trouver des professeurs principaux ou ne disposent d’un(e) Psy EN que quelques demi-journées par semaine (quand ils en ont), Psy EN dont l’orientation n’est plus le cœur de métier.
Moyens, moyens, moyens…
On va encore nous dire que nous n’avons que ce mot à la bouche et qu’avant de parler de moyens, il faudrait faire des projets et innover dans les établissements comme l’a suggéré le président de la République, lequel souhaite intégrer la question scolaire (et en particulier celle du collège) dans les débats de son « CNR » (Conseil national de la refondation)…
Malheureusement, tous les discours et les volontés de « réforme » se heurtent à la réalité de ce que sont les collèges dans notre académie ou ailleurs. Depuis plusieurs années, les mouvements se sont succédés pour empêcher les fermetures de classes et la baisse des DGH.
On l’a vu dans les collèges ruraux de Haute-Saône et du Jura, dans ceux de Besançon ou de l’aire urbaine. La plupart des établissements sont aujourd’hui touchés d’une manière ou d’une autre : effectifs chargés sur un ou plusieurs niveaux, hétérogénéité croissante, accentuation par les crises des difficultés scolaires, personnels mis en difficulté par les conditions d’exercice (partage de postes, suppressions de postes, éloignement) …
Dans la plupart des collèges, la période de la DGH et de sa répartition pose les mêmes questions chaque année, les maigres marges de collège 2016 ayant été peu à peu rognées.
Que dire donc d’une énième réforme annoncée ?
Yves Durand, ancien député socialiste désormais proche de LREM et ancien rapporteur de la loi sur la refondation de l’école de 2013 (sic) rappelle que le collège « n’est pas plus malade que le reste » et qu’il faut « prendre le temps du consensus » et « arrêter les réformes par à-coups, sans cohérence d’ensemble, qui donnent le tournis aux enseignants et aux parents »... CQFD.
Ajoutons simplement à ce constat que nous, enseignants, sommes les plus à même de savoir comment faire évoluer le collège. Et nous ne parlons pas ici de concertations qui n’en ont que le nom mais du projet que porte par exemple le SNES-FSU dans les instances et les établissements, (vous avez dit « dialogue social » ?). Rappelons enfin qu’il faut aussi nous donner les moyens pérennes (aïe, encore ce gros mot) de faire du collège, mais aussi du primaire et du lycée, les lieux de la réussite de tous les élèves.
* toutes les citations ont été reprises de l’article écrit par E. Pommiers et S. Lecherbonnier et paru sur lemonde.fr le 26 septembre 2022.