Sochaux - Éducation et société Collège : un lundi de grève
La majorité des enseignants travaillant aujourd’hui dans l’établissement, le plus important du pays de Montbéliard, sont en grève. Ils protestent contre la disparition brutale de deux contrats aidés.
Pour Bérenger Priouzeau, professeur de lettres classiques, comme pour ses collègues grévistes, les contrats aidés ne sont pas seulement utiles : ils sont indispensables.
Photo Francis REINOSO
N’en déplaise aux esprits chagrins et aux parents d’élèves chafouins, non, les professeurs ne sont pas souvent en grève. Quand ça arrive, de plus en plus rarement d’ailleurs, c’est la plupart du temps sur une initiative et des revendications nationales. Le mouvement d’aujourd’hui au collège Jouffroy d’Abbans de Sochaux n’en est que plus notable : non seulement le mot d’ordre est purement local mais il ne concerne même pas directement le métier d’enseignant !
La mobilisation - une protestation contre la fin de deux contrats aidés ce 1er octobre - est en tout cas à la hauteur : une vingtaine de professeurs cessent le travail aujourd’hui. Ils sont, au total, 59 à enseigner dans ce collège de 750 élèves, le plus important du pays de Montbéliard et le 3e du Doubs mais les grévistes représentent, en ce lundi, la majorité de ceux qui avaient des heures de cours.
L’accueil des adolescents est bien sûr assuré mais les parents ont été prévenus de ce mouvement inédit. Les deux fédérations (Peep et FCPE) ont apporté leur soutien au personnel. Car l’affaire est sérieuse : alors que la rentrée s’est passée tout à fait normalement, toute l’équipe et les élèves ont vu deux personnes cesser brutalement leurs activités le 1er octobre dernier.
Accrocher les décrocheurs
Fin septembre, le gouvernement a en effet décidé de ne pas reconduire - à l’exception du domaine de la sécurité et de l’aide aux personnes handicapées - les contrats aidés. Ce qui pose bien entendu des problèmes humains (même si le salaire, moins de 700 € pour vingt heures n’avait rien de mirobolant, cet emploi remettait à flots des personnes) mais aussi d’organisation, dans les associations mais aussi dans les collectivités locales et, on le voit bien ici, au sein de l’Éducation nationale.
À Sochaux, l’administration et l’équipe pédagogique ont obtenu ces deux contrats aidés à la précédente rentrée et ont choisi leur affectation. La première, une quadragénaire, secondait la professeur documentaliste au CDI. « Du coup, les horaires d’accueil des élèves étaient élargis », explique Bérenger Priouzeau, professeur de français et latin, syndiqué au SNES. Dans cet établissement, classé en REP (réseau d’éducation prioritaire) et où les enfants sont nombreux, il ne s’agit pas d’un détail mais tout bonnement d’une possibilité d’accès plus important à la culture et aux savoirs.
La seconde jeune femme en contrat aidé travaillait, elle, à la vie scolaire et notamment à l’orientation des élèves en difficulté. « Elle était plus particulièrement chargée de trouver des stages, en lien avec le CPE et de faire le lien avec les familles », poursuit l’enseignant. Grâce à elle, un jeune de 16 ans, qui pensait arrêter les études a trouvé sa voie dans l’apprentissage à la suite d’un stage en mécanique.
Au-delà de la satisfaction que pouvaient donner les deux personnes en contrats aidés, leur utilité n’était plus à démontrer.
Avant le 1er octobre, les enseignants ont envoyé une demande d’explications à l’inspecteur d’académie. Sans réponse. Aujourd’hui, ils réclament un entretien avec le même, ainsi qu’avec le sous-préfet. « C’est énorme : on nous enlève des moyens qui sont indispensables, sans un mot », soupire Bérenger Priouzeau. « On ne peut accepter ça sans rien faire. »