13 avril 2025

Publications

La feuille de « déroute » RH

La récente présentation de la feuille de route RH lors du CSA académique du 13 mars révèle l’ampleur du cynisme institutionnel. Non contents de précipiter l’Éducation nationale dans le ravin, nos « brillants stratèges » ont l’audace de baptiser "feuille de route" ce qui s’apparente davantage à une notice d’enterrement du service public.

Quelle ironie de voir nos "innovants" gestionnaires ressusciter les méthodes managériales qui ont mené France Télécom au désastre social que l’on connaît ! Ces mêmes recettes qui ont généré vagues de suicides et souffrances massives sont aujourd’hui présentées comme des solutions d’avenir pour notre institution. Visiblement, les leçons du passé n’ont pas franchi les portes blindées des bureaux ministériels. Et comble du ridicule : on nous accuse de "résister au changement" et de "déformer la réalité à travers une analyse erronée" quand nous dénonçons ces pratiques mortifères. Comme si s’opposer au suicide collectif était un réflexe conservateur !

"Marque employeur", "viviers de talents", "fidélisation des ressources"... Ce lexique, directement importé des cabinets de conseil en faillite intellectuelle, sert de cache-misère à l’indigence des solutions proposées. Cette feuille de "déroute" déploie tout l’arsenal habituel des entreprises en perdition : portails numériques dysfonctionnels, ateliers sans suite, questionnaires de satisfaction destinés aux archives. On croirait assister à la réunion marketing d’une start-up au bord de la liquidation judiciaire, pas à la stratégie RH d’un ministère régalien ! Le tout au service de deux objectifs : en premier lieu, recruter des contractuels et en second lieu, cacher la misère. Pendant que nos élèves suffoquent dans des classes surchargées et que nos collègues s’effondrent sous la charge de travail, on nous parle "d’expérience collaborateur" et "d’ambassadeurs de valeurs". Ces mots creux sont les hochets qu’on agite pour détourner l’attention de l’essentiel : l’effondrement programmé du service public d’éducation. Comble du cynisme, le rectorat affiche sa préoccupation pour les personnels en situation de handicap, pour la protection des agents, pour l’égalité femmes-hommes... sans rien mettre en place pour atteindre ces objectifs.

La "reconnaissance" façon distributeur automatique ne peut cacher la réalité du terrain, qui reste la même : précarité endémique, salaires indécents, moyens insuffisants, reconnaissance inexistante. Le sommet du mépris réside dans ces dispositifs de "valorisation" automatisés : mails génériques de félicitations, badges numériques de compétences, et autres « hochets » virtuels censés compenser l’absence de revalorisation concrète. C’est bien une reconnaissance au rabais !

L’heure n’est plus aux compromis ! Contrairement à ce qu’affirment nos détracteurs, notre "analyse syndicale" est simplement celle de l’intérêt général face à l’idéologie mortifère du tout-management.