MARDI 22 MAI
GRÈVE
INTERSYNDICALE ET INTERPROFESSIONNELLE
À L’APPEL DE TOUS LES SYNDICATS DE LA FONCTION PUBLIQUE
Les attaques contre la fonction publique sont à la hauteur des objectifs du gouvernement Macron : responsables de (presque) tous les maux du pays, nous serions privilégiés, trop nombreux, fainéants à cause d’un statut dépassé et rigide…
Il faudrait donc un « plan de départs volontaires », une augmentation des contractuels à hauteur de 30 % des effectifs, un plan de suppression de 120 000 postes, la vente à la découpe de pans entiers de notre patrimoine collectif (SNCF, Française des jeux…), et le torpillage du principe de non licenciement du fonctionnaire pour sortir le pays de l’ornière.
Qui peut encore y croire ? Moins d’École, moins d’hôpital, moins de police, moins de crèches feraient mieux fonctionner le pays ? Plus de contractuels permettraient un meilleur service public ? Le droit de licencier les fonctionnaires nous pousserait à mieux travailler ? Les cas d’autres pays ayant suivi cette voie ne suffit pas à démontrer qu’il s’agit d’une impasse ?
Ces affirmations manifestent une ignorance délibérée de l’histoire et du rôle de la fonction publique dans notre société*, pour mieux esquiver le débat sur les enjeux en termes de cohésion sociale, de solidarités, de développement économique, d’effectivité des droits, de développement durable… Le cynisme de ceux qui prônent le démantèlement des services publics est consternant : ce sont justement eux qui profitent le plus des largesses de l’État français. Et il est généreux !
Ceux qui imposent le gel du point d’indice depuis 8 ans s’octroient des rémunérations conséquentes :
– 600 cadres de l’État, dont 150 au ministère des finances, gagnent plus de 150 000€ par an, l’équivalent du salaire du Président de la République (salaires négociés, hors grille indiciaire) ;
– 42 « autorités administratives indépendantes » ont été créées en 30 ans (CNIL, CSA …), dont bien des directeurs bénéficient de salaires eux aussi supérieurs à ceux du Président de la République…
– 127 Préfets sur 250 sont sans affectation territoriale, et 75 n’ont aucune mission ;
– Le Conseil d’État comprend 320 membres (!) qui touchent environ 10 000 € par mois - et se font payer en plus pour les conseils juridiques qu’ils donnent aux institutions étatiques, alors que c’est le rôle même du Conseil d’État ;
Ceux qui veulent la fin du statut de fonctionnaire sont ceux qui en profitent le plus. Ceux qui prônent la flexibilité sont ceux qui se préparent de discrets parachutes. En effet, la disponibilité, limitée à 9 ans pour un simple fonctionnaire, est illimitée pour d’autres ! Ainsi, il est possible d’aller travailler dans des cabinets d’avocats d’affaires ou des entreprises privées, et de retrouver ensuite son poste dans la fonction publique. Ces allers-retours favorisent les conflits d’intérêt et les délits d’initiés.
– Le décret de 1991 autorisant les anciens ministres à s’inscrire comme avocats au barreau sans passer l’examen leur permet de travailler dans des cabinets d’avocats d’affaires, où ils peuvent utiliser leurs réseaux et indiquer les failles des lois qu’ils ont fait voter (Jean-François Copé, Dominique de Villepin, Rachida Dati, Noël Mamère, Pierre Joxe par exemple) ;
– Emmanuel Macron, lors de son passage chez Rothschild, a gagné 2,8 millions d’euros brut pour avoir favorisé la fusion Nestlé-Pfizer - qui a eu pour conséquence des licenciements…, puis a fait la carrière que l’on connaît ;
– Muriel Pénicaud a gagné 4,74 millions d’euros net chez Danone, dont 1,13 million grâce à la hausse des actions du groupe suite à l’annonce d’un plan social qu’elle avait élaboré en tant que DRH…, puis est devenue présidente du Conseil national Éducation économie (CNEE) et de Business France (agence nationale au service de l’internationalisation de l’économie française), pour prendre ensuite le poste de ministre du travail ;
– François Hollande s’est fait détacher de la Cour des comptes durant... 25 ans au total, mais il aura tout de même droit à une retraite de quelques 3400 € en tant qu’ancien conseiller.
Ceux qui veulent appauvrir l’Éducation, intensifier le tri social à l’université via Parcours Sup’, augmenter les frais d’inscription à l’université, bénéficient des largesses du système universitaire :
Ils sont presque tous passés par l’ENA, où l’on est payé 2 800 euros par mois pour étudier. Mais pour pallier la crise de recrutement des enseignants, ils envisagent de faire travailler un étudiant de L3 à raison de 9h de cours par semaine pour 750 euros...
Le noyautage de l’État par une élite sociale plus préoccupée de ses intérêts particuliers que de l’intérêt général n’est pas nouveau, le sociologue Bourdieu le dénonçait déjà il y a 30 ans* . Mais à l’heure actuelle, le boulevard que cette élite s’est taillé entre fonction publique (tout particulièrement Bercy, siège du ministère des finances) et banques ou cabinets d’avocats d’affaires est inédit et conduit à des comportements carnassiers**. Les loups sont entrés dans Bercy. À nous de les déloger...
La Fonction publique est un investissement,
non un coût pour la collectivité.
Elle est la richesse des pauvres et nous devons la défendre !
* Bourdieu : la noblesse d’État
** comme le souligne le sociologue A. Vauchez dans son ouvrage "Sphère publique – intérêts privés"